jeudi 6 décembre 2007

Les geôles de l'ignorance !


Je viens de recevoir mon numéro de janvier du journal Alternatives. Première page, un titre attire mon attention : Les geôles de l'ignorance, un article écrit par Gilles Mcmillan portant sur l'analphabétisme au Québec. Un article troublant à bien des égards. J'ai toujours pensé qu'environ 25% des québécois étaient analphabètes fonctionnels mais voilà que, selon les résultats de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (EIACA, 2003), 49 % des Québécois âgés de 16 à 65 ans éprouvent de telles difficultés à lire.


Pour monsieur Mehran Ebrahimi, professeur au Département de management et de technologie de l’UQAM, spécialisé en études comparées des systèmes d’éducation dans le monde, "l’enquête internationale rend compte d’une situation tellement catastrophique, qu’il n’y a pas à tergiverser sur les questions de terminologie, pourcentages et méthodologie. La situation est grave, point."


La situation que nous vivons au Québec (et particulièrement dans la région de la Chaudière-Appalaches) est "le résultat de décisions politiques aliénées à une idéologie, le capitalisme financier, qui confisquent tous les secteurs de la société. Une règle : gagner vite de l’argent, qu’importe comment, et consommer. Selon cet esprit, qui ne s’applique pas de manière aussi brutale dans tous les pays de l’OCDE, l’éducation, la formation et la culture représentent une perte d’argent. Elles sont même détestables, une affaire de loser." selon monsieur Ebrahimi.


Le paragraphe sur la haine de l'éducation et de la culture donne froid dans le dos.


La conclusion de l'article de monsieur Mcmillan est tout à fait juste: "Que reste-t-il des pratiques démocratiques quand l’école et la culture sont envahies par l’esprit d’entreprise et de l’entrepreneurship ? Ne vous demandez pas pourquoi les médias ne soulèvent pas le problème de l’analphabétisme ou de l’illettrisme au Québec, pas plus que les universités ou si peu. M. Ebrahimi parle même d’une loi du silence à ce sujet. Alors que dit-elle cette loi du silence et, à travers elle, les analphabètes ? Que les geôliers de l’ignorance l’emportent ?"

3 commentaires:

richard a dit…

Comment réagir? Que dire? Je me sens las, las, las, pour ne pas dire que je baisse les bras.

Bon, il faut garder espoir mais effectivement nous fonctionnons dans une société ultra utilitariste. Je rencontre parfois des jeunes qui voudraient en savoir plus, mais j'en rencontre aussi qui regrettent de ne pas savoir. Leur regard ne porte aucun reproche car comment peuvent-ils nous reprocher quoi que ce soit? Ils n'ont aucune aulne à laquelle se mesurer, l'histoire encore moins!

Le PQ a complètement raté ce passage et à ce niveau, je crois qu'il a été notre pire ennemi. Il a endossé cet esprit de la révolution tranquille que la connaissance équivalait à un certain élitisme, élitisme qui a engendré le mépris de la connaissance. La révolution tranquille, dans une certaine mesure, a jeté l'eau du bain avec le bébé sous prétexte que nos "élites" nous avaient méprisés.

On vas-tu en revenir du misérabilisme ouvrier? Un plombier peut connaître Racine, Euclide et Cicéron! J'ai connu un garagiste qui a choisit cette profession bien qu'il ait suivit un cours classique!

Pour être cru, au Québec, posséder une certaine culture c'est, au pire, être "tapette", "fif", au mieux, un pelleteux de nuage, un masturbateur intellectuel. Et les trous du cul du ministère de l'Éducation n'ont fait que pousser le bouchon plus loin, perdus qu'ils sont dans leurs chimères psycho-pédago-éduco-après-moi le déluge-les-parent-ne-connaissent-rien-et -le-passé-on-s'en-câlisse. Quand je dis passé, évidemment je réfère à l'histoire. N'est-ce pas notre cher ministère de l'Éducation qui a décidé de proposer une histoire du Québec "lave-plus-blanc" au mépris de notre mémoire collective? Sans pressions d'un gouvernement fédéral oppresseur?

Je n'aurais jamais pensé dire une chose pareille, mais nous sommes notre pire ennemi et nous devons être placé sous protection de crainte que nous nous autodétruisions, et nous sommes mal barrés!

Et j'y reviens, le PQ a été notre pire ennemi dans cette conquête où le "respect" du peuple signifiait "voler au ras des pâquerettes". Nous avions les ministères, les ressources financières, le personnel, enfin tout ce qu'il fallait. Pour paraphraser notre cher Duplessis, l'"instruction" monte à la tête de plusieurs. Imbus de la science académiquement infuse, certains pensent pour nous et ils nous font payer cher leurs frustations adolescentes!

Tous les jours, je suis confronté à cette ignorance crasse de notre passé et je ne parle pas que de notre passé québécois, mais humain. Avant nous, le chaos, après nous, le déluge.

Devant la rareté de la main-d'oeuvre, des employeurs réalisent la pauvreté intellectuelle de leur personnel, enfin ceux qui sont en mesure de le réaliser car ils partagent souvent le lot de leurs employés : une acculturation profonde.

Je pourrai m'étendre encore longuement sur le sujet mais pour conclure sommairement, je reviens au triste rôle du PQ que j'accuse de "culturicide" et dont les pires outils ont été ceux et celles issus des cours classiques et qui ont eu la "chance" d'être connectés à l'histoire de monde. Leur crime? D'avoir expérimenté avec trois sinon quatre générations de nos enfants, d'avoir méprisé la culture générale au profit d'une non-culture purement utilitariste sous prétexte que la philosophie, l'histoire, la géographie, enfin les sciences humaines sont des à-côtés des sciences pures. J'en veux pour preuve les exigences en mathématiques pour réussir son secondaire. On peut connaître Euclide mais pas "Mauliaire" et encore moins "Cheikspire" ou "Châtobrillan"! On oublie qu'Euclide n'avait pas de doctorat en géométrie ou en mathématique...

Richard

La grenouille a dit…

Bonjour,

Intéressant, ce billet. Je suis toujours surprise de lire les chiffres concernant l'analphabétisme fonctionnel. La question que je me pose toujours porte sur le concept en tant que tel. Que veut dire, au juste, "analphabète fonctionnel"? Qu'est-ce qui définit l'état? Comment affirmer qu'untel l'est mais pas un autre? Quels sont les paramètres dont il faut tenir compte? Il doit en exister si on est capable de quantifier cette population. Je me demandais donc si l'article que vous avez consulté explique la chose et nous en apprend plus sur le phénomène.

Merci!

La grenouille

Louhel a dit…

Très intéressant cher Pierre.. Merci de l'information...

Bonne Année!