Il y a des gestes que l'on pose et qui nous marquent pour la vie. Des actions collectives auxquelles on collabore et qui orientent, en quelque sorte, le cours d'une existence. Il y a quarante ans, aujourd'hui, je participais, avec une cinquantaine de camarades, à l'occupation du Pavillon des Sciences de l'Université de Moncton. Cette occupation a duré 8 jours mais elle est encore très présente dans mon esprit.
Autour d'un leader fort et charismatique, Michel-Vital Blanchard, nous avons résisté pendant huit jours et huit nuits jusqu'à ce que la police, à la demande de l'administration de l'Université, vienne nous expulser paisiblement en nous promettant qu'il n'y aurait aucune accusation. On ne peut pas dire que les étudiants de l'Université ont fait corps avec notre mouvement; ils avaient plutôt hâte qu'on cesse nos niaiseries. Reste que je suis persuadé que cette action d'éclat a aidé à faire en sorte que l'Acadie est plus fière que jamais de ses racines et qu'elle a donné du courage aux résistants que sont les Acadiens.
Natif de Québec, à la fin des mes études "collégiales"(même si les CEGEP n'étaient pas encore mis sur pied) j'ai choisi de m'inscrire à l'Université de Moncton pour y poursuivre des études universitaires en économie. Ce n'était pas vraiment un choix puisque c'était la seule université francophone acceptant des étudiants qui, comme moi, avaient complété une treizième année commerciale. De ma première année universitaire en 1967-1968 je ne souviens plus très bien si ce n'est que je passais plus de temps aux activités parascolaires que scolaires en plus des abus de bières quasi quotidiens. Une grève étudiante en février '68 qui a duré quelques semaines au auquel j'ai participé bien sûr; quelques manifestations dans les rue de Moncton et auprès du Maire Jones de l'époque afin de réclamer plus de place pour le français dans cette ville unilingue anglophone et orangiste. Les notes n'étant pas au rendez-vous je demandai, à la fin de cette année scolaire, aux autorités de l'Université de me réorienter vers la sociologie pour une nouvelle inscription en 68-69.
Cette année universitaire fut pire que la précédente pour les absences aux cours. J'étais impliqué, jusqu'au cou au ciné-club et aux activités politiques de l'association étudiante. C'était bien sûr la bataille des Acadiens mais, comme Québécois, je me sentais touché par ce combat pour la survie d'une nation.
À l'automne 1968, l'idée d'occuper le Pavillon des Sciences de l'Université nous vint à l'esprit. C'était un grand coup ! Une opération bien menée. Nous avions les plans détaillés du bâtiment et nous nous sommes préparé de longue main dans le plus complet silence. À la surprise générale, le samedi soir 11 janvier la cinquantaine d'étudiants et d'étudiantes qui étions dans le coup prenions d'assaut cet édifice après en avoir expulsé le gardien et subtilisé son trousseau de clefs.
Barricadé et prêt pour un long siège nous réclamions des Gouvernements provincial et fédéral qu'ils investissent des sommes considérables à cette université francophone qui était le parent pauvre des études supérieures au Nouveau-Brunswick. Ces évènements de 1968-1969 ont été immortalisés dans un documentaire de Pierre Perreault et Michel Brault: L'ACADIE, L'ACADIE ! Je viens d'ailleurs de le commander à l'ONF et les images ce message en sont tirées.
Autour d'un leader fort et charismatique, Michel-Vital Blanchard, nous avons résisté pendant huit jours et huit nuits jusqu'à ce que la police, à la demande de l'administration de l'Université, vienne nous expulser paisiblement en nous promettant qu'il n'y aurait aucune accusation. On ne peut pas dire que les étudiants de l'Université ont fait corps avec notre mouvement; ils avaient plutôt hâte qu'on cesse nos niaiseries. Reste que je suis persuadé que cette action d'éclat a aidé à faire en sorte que l'Acadie est plus fière que jamais de ses racines et qu'elle a donné du courage aux résistants que sont les Acadiens.
À la fin de cette année scolaire, l'Université de Moncton a décidé d'abolir le Département de Sociologie parce qu'on y trouvait des étudiants et des professeurs trop engagés (vous trouverez ici un document intéressant sur l'historique de la fermeture de ce département et sur notre lutte à l'Université). Pour ma part, je recevais, vers le mois de juillet, une lettre de la Direction de l'Université m'interdisant de me présenter à nouveau sur le campus sous peine de poursuite. Une dizaine d'étudiants mêlés de près à cette action ont aussi été expulsés de l'Université. Je me suis donc inscrit à la toute jeune Université du Québec à Montréal mais je suis tombé en pleine mobilisation contre le "Bill 63" , les suites de McGill français et St-Léonard, l'émeute de Murray Hill et la crise d'octobre l'année suivante. Comment voulez-vous étudier dans de telles circonstances ?
J'ai réalisé, à l'Université de Moncton, que ma vie en serait une de militant. Pour l'Indépendance du Québec d'abord mais aussi pour la langue française, l'histoire nationale et le patrimoine d'où mon engagement envers le Parti Québécois et les mouvements citoyens indépendantistes. Militant aussi pour le faible, l'exploité, le soumis contre le fort; militant contre les Monsanto et Wall Mart de ce Monde d'où mon engagement, entre autre, chez Équiterre; militant contre les guerres, les atteintes aux droits de la personne et la violence sous toutes ses formes chez Aministie Internationale.
Je voulais partager, avec vous, ce retour vers le passé loin d'être nostalgique. Si l'on veut que les choses changent, il faut MILITER bon yenne !
2 commentaires:
Vous avez la tête dure. Même après plus de 40 ans vous n'avez pas encore compris que l'Acadie c'est finie. Ce qui va changer le monde c'est la souveraineté politique du Québec. Amicalement. Gilles Couture
Pierre, je suis 100% derrières vos idées admirables. Gilles, j'ai travaillé 6 ans en Acadie, à l'université justement, non l'Acadie ce n'est pas fini. Et oui à la libération du Québec!
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